Concurrence déloyale par récupération de documents confidentiels de l’ancien employeur : quels sont les actes interdits et qui est responsable ? Un arrêt de la Cour de cassation du 17 mai 2023 (Cass. com. 17 mai 2023 n°22-16.031) apporte des éclairages :

Après avoir été licencié pour faute grave par une société d’ingénierie industrielle, un responsable de développement commercial avait créé sa propre société. L’ancien employeur a découvert que le salarié avait, avant son départ de l’entreprise, transféré de sa messagerie professionnelle à sa messagerie personnelle des courriers électroniques auxquels étaient joints des documents contenant des « données commerciales d’une très grande importance » : une liste de projets de 34 grandes entreprises clients potentiels, divers actes commerciaux, enregistrements de commandes, tableaux de reporting, documents visant la stratégie de l’employeur dans l’Ouest de la France, etc.

Après le licenciement de ce collaborateur, l’ancien employeur décide d’assigner en concurrence déloyale la nouvelle société concurrente créée par ce dernier. La cour d’appel de Lyon avait condamné cette nouvelle société en considérant que le transfert et la détention des documents en question constituait un acte de concurrence déloyale, sans qu’il soit nécessaire de prouver l’utilisation commerciale desdites informations confidentielles pour qualifier les actes de concurrence déloyales.

La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel et apporte deux précisions :

1️⃣ Elle reprend l’argument de la cour d’appel en disant que certes, « la détention ou l’appropriation d’informations confidentielles appartenant à une société concurrente apportées par un ancien salarié constitue un acte de concurrence déloyale » toutefois elle indique qu’en l’espèce, la cour d’appel avait privé sa décision de base légale en ne constatant pas la preuve de cette appropriation ou de cette détention par la société concurrente. Seule la preuve d’une détention par l’ancien salarié était rapportée, et pas par la nouvelle personne morale.

2️⃣ Elle ajoute que le salarié n’avait pas encore créé la nouvelle société au moment du transfert des documents vers sa messagerie personnelle et retient que « la société qui n’était alors ni constituée, ni immatriculée n’aurait pu être reconnue coupable des agissements de son dirigeant ».

C’est donc contre son ancien salarié que l’action aurait dû être dirigée, et pas contre la société nouvelle.