ACCORD ENTRE LA SACEM ET UN EMETTEUR DE NFT MUSICAUX

17/11/2022

La SACEM a communiqué le 15 novembre 2022 sur la signature d’un accord sur les NFT musicaux avec Pianity. Cet accord a pour objectif de mettre en place une rémunération des auteurs sur les ventes des titres musicaux sous forme de NFT. Selon le communiqué, cet accord inclut notamment le "droit de suite" : « A ce titre, chaque fois qu’un de ces NFT sera revendu à l’avenir, les créateurs de l’œuvre musicale bénéficieront d’une nouvelle rémunération ».

Cet accord est intéressant à plusieurs titres. Il éloigne le NFT d’une assimilation dans le monde numérique au support matériel du monde physique. En effet, avec la règle de l’épuisement du droit de distribution, la revente des supports matériels d’une oeuvre (un vinyle par exemple) échappe à toute perception des auteurs.

En instaurant un « droit de suite » sur les reventes de NFT, l’acquéreur du NFT devient plus un licencié qu’un propriétaire puisque la liberté qu’il a sur son NFT sera limitée par l’existence de ce droit de suite.

Cela implique que les NFT soient revendus au sein d’un écosystème clos, ce qui éloigne également le NFT d’une assimilation à un vrai bien numérique. A moins que le smartcontract associé ne génère automatiquement le reversement de la redevance en crypto, mais le communiqué de presse n’en souffle pas mot.

Si l’on comprend l’intérêt pour les auteurs, il faut également être prudent à ne pas détruire la valeur marchande initiale du NFT : le NFT est par essence moins intéressant si celui qui le possède ne le possède pas entièrement.

DUREE DES DROITS VOISINS DES ARTISTES ET PRESCRIPTION

10/11/2022

La durée des droits des artistes-interprètes n’est pas à confondre avec la prescription de l’action en réparation d’une atteinte à ces droits. Deux danseurs revendiquaient des droits voisins pour avoir participé en 1983 à l’enregistrement du clip d’une chanson d’Elton John. Faisant valoir que ce clip avait été exploité sans qu’ils aient donné leur autorisation ni reçu de rétribution, ils invoquaient une violation de leurs droits moraux et patrimoniaux.

Le juge de la mise en état a déclaré irrecevables comme prescrites les demandes des danseurs. Ces derniers ont critiqué cette décision en ce qu’elle aurait pour conséquence de faire tomber le clip litigieux dans le domaine public alors que l’article L.211-4 du code de la propriété intellectuelle prévoit que la durée des droits patrimoniaux des artistes-interprètes est de 50 ans à compter du 1er janvier de l'année civile suivant celle de l'interprétation et, quand l'interprétation est fixée dans un vidéogramme, de 50 ans après le 1er janvier de l'année civile suivant sa mise à la disposition du public. Le droit moral est quant à lui imprescriptible.

La Cour d’appel de Paris rappelle, par un arrêt du 2 novembre 2022 (n° 21/14698), qu'il convient de distinguer entre le droit conféré à l'artiste-interprète et l'action visant à sanctionner une atteinte portée à ce droit. Il est constant que si le droit moral de l'artiste-interprète est imprescriptible, et son droit patrimonial ouvert pendant 50 ans, les actions en paiement des créances nées des atteintes portées à l'un ou à l'autre de ces droits sont soumises à la prescription de droit commun de l’article 2224 du code civil, à savoir 5 ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

En conséquence, l’action est déclarée prescrite pour les faits antérieurs au délai de 5 ans précédant les assignations en justice, à savoir : la communication du clip au public dès 1983 à la télévision et durant les concerts d’Elton John puis sur internet dès 2010. Les demandes fondées sur l’utilisation du clip dans un biopic de l’artiste sorti en 2019 ne sont en revanche pas prescrites mais l’action est tout de même déclarée irrecevable du fait du défaut de qualité à défendre des défendeur.

REMAKE ET CESSION DE DROITS D’AUTEUR

8/11/2022

Qu’est ce-qu’un « Remake » de film ? Le réalisateur du film 'Les Nouvelles Aventures d'Aladin' avait conclu en 2014 un contrat de cession de droits d’auteur avec la société de production du film. Le contrat prévoyait notamment une rémunération complémentaire de l'auteur en cas de production d'un « Remake, Prequel, Sequel ou Spin-off ». Le film est sorti en 2015.

La société de production a ensuite, en 2017, décidé de produire le film 'Les Nouvelles Aventures de Cendrillon' dont la réalisation a été confiée à un autre réalisateur.

Considérant que ce film constituait un remake de son film, ou à tout le moins un spin-off, le premier réalisateur a estimé qu'en l'absence de versement de la rémunération complémentaire négociée, la société de production avait commis une faute contractuelle, des actes de contrefaçon et des actes de parasitisme.

La Cour d’appel de Paris, dans sa décision du 21 Octobre 2022 (n° 20/18408) infirme le premier jugement et retient qu’elle doit "au seul regard de la définition claire du remake donnée par le contrat vérifier si le film 'Les Nouvelles Aventures de Cendrillon' reprend en substance tout ou partie des thèmes, intrigues, situations, personnages, dialogues, voire découpage, cadrage, mise en scène du film 'Les Nouvelles Aventures d'Aladin’".

Elle constate de grandes similitudes entre les deux films litigieux dans le traitement des thèmes, intrigues, découpage et mise en scène. Par ailleurs, la promotion du film 'Les Nouvelles Aventures de Cendrillon' a été faite en référence constante au film 'Les Nouvelles Aventures d'Aladin' et la filiation de l'un avec l'autre a été un élément de communication utilisé par les producteurs.

Ainsi, bien que l’histoire ait été racontée de façon différente en raison du conte dont le film est inspiré, la Cour retient que le film 'Les Nouvelles Aventures de Cendrillon' doit être qualifié de "remake" au sens du contrat.

La Cour retient que la qualification contractuelle du remake ouvre droit à rémunération telle que négocié, mais ne constitue pas un acte de contrefaçon… ce qui n’est pas en accord avec la dernière jurisprudence de la Cour de cassation du 5 octobre 2022.

Dans les contrat de cession de droit, attention aux clauses types qui sont réutilisées d’un contrat à l’autre, sans plus être lues ou négociées !

RAPPORT DU CSPLA SUR LES NFT

25/07/2022

Le CSPLA a publié le 12 juillet 2022 son rapport riche de 95 pages sur les NFT et leur place dans le secteur culturel. Le rapport rejoint l’analyse qu’Etienne Papin développait à la Revue Lamy Droit de l’Immatériel en décembre dernier lorsqu’il conclut qu'un jeton non fongible (JNF ou NFT) « est assimilable à un bien meuble incorporel, qui correspond à un titre de propriété sur le jeton inscrit dans la blockchain, auquel peuvent être associés d’autres droits sur le fichier numérique vers lequel il pointe ». Le NFT est le titre de propriété du fichier numérique auquel il se rapporte et cette propriété ne porte pas, en général, sur la propriété intellectuelle de l’oeuvre reproduite dans le fichier. Le rapport s’interroge également sur la rémunération des auteurs par un droit de suite, qui impliquerait un nombre limité d’exemplaires, et le régime de responsabilité des plateformes de type OpenSea ou SuperRare.

RAPPORT SUR LE LIVESTREAM

07/07/2022

Le Centre national de la musique et l'Arcom viennent de publier une étude sur le livestream musical.

La crise sanitaire a été un accélérateur pour le livestream. 45% des internautes français ont assisté à un spectacle musical en livestream, en direct ou en différé. Mais le rapport pointe les incertitudes du cadre réglementaire entourant le livestream de même que les évolutions attendues sur ces sujets :

• taux de TVA appliquée sur le livestream
• taux des redevances collectées pour les droits d’auteur
• rémunération des artistes-interprètes
• et l’adoption d’un droit voisin pour les producteurs de spectacles

ACCORD POUR LES COPRODUCTIONS FRANCO-CANADIENNES

17/06/2022

L’accord de coproduction dans les domaines du cinéma, de la télévision et des services de médias audiovisuels à la demande (SMAD) entre le Gouvernement française et le Gouvernement du Canada, signé le 28 juillet 2021, a été publié au JO du 15 juin 2022.

Les œuvres réalisées en vertu de cet accord sont considérées à la fois par la France et par le Canada comme des productions nationales qui peuvent dès lors bénéficier de l’octroi d’avantages accordés à l’échelle nationale. La France et le Canada doivent également faciliter l’importation et l’exportation du matériel nécessaire à la réalisation des œuvres, ainsi que l’entrée et le séjour sur leur territoire du personnel artistique et technique collaborant à l’œuvre.

L’accord fixe les critères permettant de bénéficier du statut de coproduction franco-canadienne, notamment :
• Contribution financière minimale par les producteurs français et canadien (20% minimum du budget total de la production) ;
• Lieux de tournage, services techniques et doublages sur le territoire des États coproducteurs ;
• Générique de l’œuvre mentionnant cette coproduction ;
• Engagement de distribution ou de diffusion sur le territoire des États tant pour les œuvres télévisuelles et cinématographiques que celles destinées à un SMAD.

CUMUL DE DROIT D’AUTEUR SUR UNE SUITE DE PIECES DE THEATRE

20/05/2022

La Cour d’appel de Paris rappelle, dans un arrêt du 11 mai 2022, que la protection d’une oeuvre par le droit d'auteur s’apprécie de façon concrète sur la base des éléments effectivement créés par des personnes physiques identifiées, et pas sur la base de déclarations faites à la SACD, dans des contrats ou dans des échanges de courriels.

La Cour d’appel de Paris était saisie d’un litige relatif à trois pièces de théâtre étant la suite les unes des autres :

Version 1 - « Ma Belle-mère et moi », pièce initiale écrite par un auteur 1
Version 2 - « Ma Belle-Mère, mon ex et moi » pièce remaniée par un auteur 2 sur la base de la pièce initiale 
Version 3 - « Ma Belle-mère et moi, 9 mois après » pièce qui se présentait comme la suite de la pièce initiale, et écrite par un auteur 3, avec la participation de l’auteur 1

L’auteur 2 a introduit une action en contrefaçon à l’égard de l’auteur 3 et de la société ayant produit cette 3ème pièce pour avoir écrit et représenté une pièce de théâtre étant la suite de celle dont il était l’auteur, sans son autorisation, et donc en violation de son droit moral et de ses droits patrimoniaux.

● La Cour retient que la version 2 de la pièce est une œuvre composite originale, dérivée de la pièce initiale, écrite avec l’accord de l’auteur 1. De nombreux apports originaux de l’auteur 2 sont identifiés concernant notamment :
- la trame de l’histoire ; 
- les caractères et l’importance des personnages ;
- les relations entre les personnages.  

Il est ainsi démontré que la deuxième version de la pièce de théâtre "contient des éléments qui lui sont propres et personnels, et [qui] relèvent de choix arbitraires révélant l’empreinte de sa personnalité et [qui] doit donc bénéficier de la protection au titre du droit d’auteur (…)".

● La Cour retient que la troisième version de la pièce "reprend les mêmes personnages principaux (…), se présente comme la suite logique et chronologique de la version 2, lui empruntant de nombreux éléments tels le caractère de personnages et les intrigues".  

La Cour d’appel, condamne alors les auteurs et la société de production de cette version 3 au versement à l'auteur 2 de 5 000 euros de dommages-intérêts au titre du droit moral, et 20 000 euros au titre de ses droits patrimoniaux.

STREAMING ET REMUNERATION DES ARTISTES

17/05/2022

L’accord relatif à la rémunération minimale des artistes-interprètes dont les musiques sont diffusées en streaming a été trouvé. L’article L212-14 du code de la propriété intellectuelle dispose que « la mise à disposition d’un phonogramme de manière que chacun puisse y avoir accès de sa propre initiative, dans le cadre des diffusions en flux (en « streaming » donc), fait l'objet d'une garantie de rémunération minimale. »

Une ordonnance du 12 mai 2021 était venue préciser que cette rémunération minimale serait établie par accord entre :
• d’une part, les organisations professionnelles représentatives des artistes-interprètes et les organismes de gestion collective les représentant ;
• d’autre part, les organisations professionnelles représentatives des producteurs de phonogrammes et les organismes de gestion collective les représentant ;

Le communiqué de presse publié par les organisations énonce que l’accord prévoit :
● Un taux minimum de « royalties » dues aux artistes‐interprètes principaux pour la diffusion de leurs titres en streaming
● Une avance minimale garantie de 1000€
● Un intéressement au succès des titres en streaming au bénéfice des musiciens
● Une rémunération forfaitaire au bénéfice de tous les musiciens
● Un renforcement du FONPEPS, fonds privé/public soutenant l’emploi artistique
● D’autres mesures "d’encadrement des rémunérations".

EXERCICE ILLEGAL DE L’ACTIVITE DE PRODUCTEUR DE SPECTACLES

13/04/2022

Double peine pour un chef d’orchestre dont l’activité allait bien au-delà de la direction d’orchestre. Cette personne assumait en effet la totale responsabilité des spectacles, du recrutement des musiciens et artistes de complément aux déclarations et paiement des charges sociales en passant par la promotion des spectacles, la négociation avec les organisateurs, la gestion des manifestations ou encore l'emploi de personnel fixe pour le suivi organisationnel et financier de l'orchestre. Elle a donc été condamnée pénalement des chefs d’exercice d’une activité d’entrepreneur de spectacles sans licence. L’activité a beau être illicite, elle n’en est pas moins réelle. La Cour de cassation, par un arrêt du 7 avril 2022 (n°20-18.284), confirme que la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse est bien fondée à exiger de cette personne le règlement des cotisations sociales et majoration dues pour l’exercice d’une activité professionnelle, en l’espèce une profession libérale s’agissant d’un entrepreneur sans licence.
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