Actualités
06/12/2022
Contrefaçon d’œuvres dérivées de l’univers de Tintin et précision sur la notion de parodie en droit d’auteur. La société Tintinimaginatio disposant des droits sur l’œuvre d’Hergé a assigné en référé un artiste ayant créé des œuvres dérivées de l’univers du personnage de Tintin (buste, fusée) et les sociétés qui les commercialisent via un site internet, les réseaux sociaux et des galeries d’art. Par un arrêt du 23 novembre 2022, la Cour d’appel d’Aix-en-Provence rappelle que, dans la mesure où ils présentent un caractère d’originalité, seule la société Tintinimaginatio pouvait s’inspirer des Aventures de Tintin pour commercialiser des bustes du personnage et la sculpture de la fusée, sauf à considérer que les œuvres secondaires étaient parodiques.
1️⃣ Pour cela, elles doivent présenter des différences perceptibles par rapport à l’œuvre originale afin qu’il n’y ait aucune confusion entre elles. Elles doivent par ailleurs constituer une manifestation d’humour, laquelle peut être caractérisée dès lors que la parodie peut « prêter à sourire, même intérieurement ».
2️⃣ Or, les œuvres en cause n’apportaient rien d’autre qu’une déclinaison esthétique des œuvres originales et ne s’en distinguaient donc pas suffisamment pour être qualifiées de parodie. L’argument selon lequel il s’agissait pour l’artiste de « rendre hommage » à l’œuvre apportait crédit à l'idée, soulevée par les intimés, selon laquelle il était poursuivie une fin commerciale par le truchement d'un détournement de notoriété.
➡️ Les œuvres en cause sont donc contrefaisantes et, ce faisant, constitutives d'un trouble manifestement illicite qu'il convient de faire cesser.Le 6 décembre 2022, Etienne Papin, avocat associé, a animé pour les adhérents du PRODISS un webinaire ayant pour thème : "Le paiement des auteurs : facture ou note d’auteur ?" Une question à la fois juridique, fiscale et sociale complexe, avec beaucoup de fausses croyances qui s’y attachent ! Contactez-nous pour plus d'informations.
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30/11/2022
En 2016, une association met en demeure l’hébergeur OVH de retirer sans délai le contenu d’un site internet édité par une société espagnole. Ce dernier proposait son entremise entre des mères porteuses et des clients. Or, la gestation pour autrui est pénalement sanctionnée par le droit français.
Considérant que le contenu du site n’était pas manifestement illicite, l’hébergeur a refusé de le rendre inaccessible. L’hébergeur a considéré que la GPA faisait l’objet de débats et d’options différentes selon les pays et que le site étant édité par une société espagnole et proposant ses services uniquement dans les pays où la GPA est légale (notamment l’Espagne), aucune activité interdite par le droit français n’était effectivement exercée en France.
Par son arrêt du 23 novembre 2022, la Cour de cassation constate que le public français faisait partie des cibles du site et que les informations qu’il contenait étaient bien accessibles depuis la France. Or, puisque le droit français prohibe la GPA, le fait que le site ait pour vocation de permettre à des ressortissants français d’y avoir recours rend son contenu manifestement illicite.
L’hébergeur aurait dû promptement réagir pour rendre le site inaccessible et la Cour de cassation confirme sa condamnation prononcée en appel.Retour de NEXT dans la cité de l’image fixe et animée pour une conférence sur le financement de la production audiovisuelle grâce aux NFT par Etienne Papin, avocat associé, lors des RADI RAF 2022 d’Angoulême.
Merci au Pôle Image Magelis pour l’invitation et à Morgane Parisi pour l’illustration.22/11/2022
Dans sa délibération du 10 novembre 2022, la CNIL a prononcé une amende de 800 000 euros à l’encontre de la société DISCORD Inc, laquelle ne dispose pas d'établissement en Europe.La CNIL a considéré que cette société, qui propose un service de messagerie instantanée et de discussion via microphone et/ou webcam, avait manqué à plusieurs obligations prévues par le RGPD.
● Sur la durée de conservation et l’obligation d’information à ce sujet, DISCORD a indiqué ne pas avoir de politique écrite. Or, la CNIL a constaté que plusieurs millions de comptes inactifs depuis plus de trois ans étaient toujours dans la base de données de DISCORD. DISCORD s’est mis en conformité dans le cours de la procédure.
● La CNIL constate également un manquement à l’obligation de garantir la protection des données par défaut. En effet, le fait de cliquer sur « X », censé fermer l’application sur Windows, ne faisait en réalité que la mettre en arrière-plan. Cela pouvait conduire à ce que des utilisateurs soient entendus par les autres membres présents dans le salon vocal alors qu’ils pensaient l’avoir quitté. Dans le cadre de la procédure, la société a mis en place une fenêtre « pop-up » pour alerter les utilisateurs.
● Par ailleurs, la création d’un compte nécessitait de choisir un mot de passe pour lequel n’étaient imposés que six caractères incluant lettres et chiffres. Pour la CNIL, cette politique ne permettait pas de garantir la sécurité des comptes des utilisateurs. Désormais, la société exige un mot de passe comportant huit caractères, avec au moins trois des quatre catégories de caractères et la réalisation d’un captcha après dix tentatives de connexion non abouties.
● Enfin, la CNIL constate qu’aucune analyse d’impact n’a été réalisée alors que la société traite un volume important de données, notamment d’utilisateurs mineurs.
Compte tenu des manquements retenus, du nombre de personnes concernées et en tenant compte des efforts réalisés par DISCORD pour se mettre en conformité et du fait que son modèle n’est pas fondé sur l’exploitation des données, la CNIL prononce une amende de 800 000 euros.17/11/2022
La SACEM a communiqué le 15 novembre 2022 sur la signature d’un accord sur les NFT musicaux avec Pianity. Cet accord a pour objectif de mettre en place une rémunération des auteurs sur les ventes des titres musicaux sous forme de NFT. Selon le communiqué, cet accord inclut notamment le "droit de suite" : « A ce titre, chaque fois qu’un de ces NFT sera revendu à l’avenir, les créateurs de l’œuvre musicale bénéficieront d’une nouvelle rémunération ».
Cet accord est intéressant à plusieurs titres. Il éloigne le NFT d’une assimilation dans le monde numérique au support matériel du monde physique. En effet, avec la règle de l’épuisement du droit de distribution, la revente des supports matériels d’une oeuvre (un vinyle par exemple) échappe à toute perception des auteurs.
En instaurant un « droit de suite » sur les reventes de NFT, l’acquéreur du NFT devient plus un licencié qu’un propriétaire puisque la liberté qu’il a sur son NFT sera limitée par l’existence de ce droit de suite.
Cela implique que les NFT soient revendus au sein d’un écosystème clos, ce qui éloigne également le NFT d’une assimilation à un vrai bien numérique. A moins que le smartcontract associé ne génère automatiquement le reversement de la redevance en crypto, mais le communiqué de presse n’en souffle pas mot.
Si l’on comprend l’intérêt pour les auteurs, il faut également être prudent à ne pas détruire la valeur marchande initiale du NFT : le NFT est par essence moins intéressant si celui qui le possède ne le possède pas entièrement.
Transparency and algorithmic accountability in the Digital Services Act.
Etienne Papin will be a speaker at the 2-days formation about "Online Hate Speech: Legal and Policy Developments - Focus on the Digital Services Act" organized by the Academy of European Law ERA taking place in Trier (Germany) & Online on 24-25 November 2022.
There is a lot to say about the DSA - between high expectations and reality - and Etienne Papin, partner and founder at NEXT avocats, is glad to have the opportunity to discuss it with the judges and other judicial staff, lawyers, policy officers, legal staff of NGOs and international organisations to whom the event addresses.
Click here to register10/11/2022
La durée des droits des artistes-interprètes n’est pas à confondre avec la prescription de l’action en réparation d’une atteinte à ces droits. Deux danseurs revendiquaient des droits voisins pour avoir participé en 1983 à l’enregistrement du clip d’une chanson d’Elton John. Faisant valoir que ce clip avait été exploité sans qu’ils aient donné leur autorisation ni reçu de rétribution, ils invoquaient une violation de leurs droits moraux et patrimoniaux.
Le juge de la mise en état a déclaré irrecevables comme prescrites les demandes des danseurs. Ces derniers ont critiqué cette décision en ce qu’elle aurait pour conséquence de faire tomber le clip litigieux dans le domaine public alors que l’article L.211-4 du code de la propriété intellectuelle prévoit que la durée des droits patrimoniaux des artistes-interprètes est de 50 ans à compter du 1er janvier de l'année civile suivant celle de l'interprétation et, quand l'interprétation est fixée dans un vidéogramme, de 50 ans après le 1er janvier de l'année civile suivant sa mise à la disposition du public. Le droit moral est quant à lui imprescriptible.
La Cour d’appel de Paris rappelle, par un arrêt du 2 novembre 2022 (n° 21/14698), qu'il convient de distinguer entre le droit conféré à l'artiste-interprète et l'action visant à sanctionner une atteinte portée à ce droit. Il est constant que si le droit moral de l'artiste-interprète est imprescriptible, et son droit patrimonial ouvert pendant 50 ans, les actions en paiement des créances nées des atteintes portées à l'un ou à l'autre de ces droits sont soumises à la prescription de droit commun de l’article 2224 du code civil, à savoir 5 ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
En conséquence, l’action est déclarée prescrite pour les faits antérieurs au délai de 5 ans précédant les assignations en justice, à savoir : la communication du clip au public dès 1983 à la télévision et durant les concerts d’Elton John puis sur internet dès 2010. Les demandes fondées sur l’utilisation du clip dans un biopic de l’artiste sorti en 2019 ne sont en revanche pas prescrites mais l’action est tout de même déclarée irrecevable du fait du défaut de qualité à défendre des défendeur.8/11/2022
Qu’est ce-qu’un « Remake » de film ? Le réalisateur du film 'Les Nouvelles Aventures d'Aladin' avait conclu en 2014 un contrat de cession de droits d’auteur avec la société de production du film. Le contrat prévoyait notamment une rémunération complémentaire de l'auteur en cas de production d'un « Remake, Prequel, Sequel ou Spin-off ». Le film est sorti en 2015.
La société de production a ensuite, en 2017, décidé de produire le film 'Les Nouvelles Aventures de Cendrillon' dont la réalisation a été confiée à un autre réalisateur.
Considérant que ce film constituait un remake de son film, ou à tout le moins un spin-off, le premier réalisateur a estimé qu'en l'absence de versement de la rémunération complémentaire négociée, la société de production avait commis une faute contractuelle, des actes de contrefaçon et des actes de parasitisme.
La Cour d’appel de Paris, dans sa décision du 21 Octobre 2022 (n° 20/18408) infirme le premier jugement et retient qu’elle doit "au seul regard de la définition claire du remake donnée par le contrat vérifier si le film 'Les Nouvelles Aventures de Cendrillon' reprend en substance tout ou partie des thèmes, intrigues, situations, personnages, dialogues, voire découpage, cadrage, mise en scène du film 'Les Nouvelles Aventures d'Aladin’".
Elle constate de grandes similitudes entre les deux films litigieux dans le traitement des thèmes, intrigues, découpage et mise en scène. Par ailleurs, la promotion du film 'Les Nouvelles Aventures de Cendrillon' a été faite en référence constante au film 'Les Nouvelles Aventures d'Aladin' et la filiation de l'un avec l'autre a été un élément de communication utilisé par les producteurs.
Ainsi, bien que l’histoire ait été racontée de façon différente en raison du conte dont le film est inspiré, la Cour retient que le film 'Les Nouvelles Aventures de Cendrillon' doit être qualifié de "remake" au sens du contrat.
La Cour retient que la qualification contractuelle du remake ouvre droit à rémunération telle que négocié, mais ne constitue pas un acte de contrefaçon… ce qui n’est pas en accord avec la dernière jurisprudence de la Cour de cassation du 5 octobre 2022.
Dans les contrat de cession de droit, attention aux clauses types qui sont réutilisées d’un contrat à l’autre, sans plus être lues ou négociées !3/11/2022
Une association avait porté plainte avec constitution de partie civile à l’encontre d’une assistante parlementaire qui, à la suite des élections européennes, avait publié sur Facebook un message injurieux à l’encontre de la France et des Français, déclaration que l’intéressée avait finalement supprimée moins de trois jours plus tard.
La chambre de l’instruction de la Cour d’appel de Paris avait fait droit à la demande de nullité de la plainte au fondement l’article 50 de la loi du 29 juillet 1881 au motif, d'une part, que la plainte aurait comporté une ambiguïté sur le support de diffusion des propos dénoncés et, d'autre part, aurait omis de viser l'article 23 de cette loi (lequel précise les mode de diffusion de l’injure).
La Cour de cassation rappelle, dans son arrêt du 25 octobre 2022, que l’article 50 précité n'exige, à peine de nullité, que la mention, dans l'acte initial de poursuite, du fait incriminé, de sa qualification et du texte de loi énonçant la peine encourue ; sa nullité ne peut être prononcée que si l'acte a pour effet de créer une incertitude dans l'esprit des personnes poursuivies quant à l'étendue des faits dont elles auraient à répondre.
● Or, en premier lieu, si la plainte a effectivement mentionné, comme support des propos dénoncés, le compte Twitter aux lieu et place de son compte Facebook, il ne s'est agi que d'une erreur de plume dont il n'est résulté aucune incertitude dans l'esprit de la prévenue sur l'objet des poursuites, dès lors que l'acte introductif d'instance a également reproduit, dans son entier, son message d'excuses visant, à trois reprises, la publication des propos litigieux sur son « mur » Facebook.
● En second lieu, la Cour considère qu’est régulière la plainte précisant les faits qualifiés d'injure publique envers un groupe de personnes à raison de son appartenance à une nation et visant l'article 33, alinéa 3 (punissant ce type d’injure) de ladite loi, le visa de l'article 23 n'ayant d'autre portée que de préciser le mode de publicité.
● Enfin, il est à noter que le retrait des propos litigieux, même réalisé promptement, n’a pas permis à leur auteur d’échapper aux poursuites, l’infraction étant caractérisée dès publication