Accès aux courriels pro par un ancien salarié : beaucoup de bruit pour pas grand chose autour de l’arrêt de la cour de cassation du 18 juin 2025.
Lors d’un contentieux classique entre un salarié licencié pour faute et son employeur, le salarié a demandé, au fondement de l’article 15 du RGPD, la communication de l’ensemble de « ses données, notamment les mails le concernant ». L’ex-employeur n’a pas répondu à cette demande.
Saisi du litige prud’homal, la cour d’appel de Paris constate que « la société ne justifie pas avoir communiqué les mails relatifs à M. [H], pas plus que leur métadonnées ou leur contenu, et n’invoque aucun motif pour expliquer cette abstention comme une impossibilité matérielle. » La cour considère que « Cette abstention est fautive et a causé à M. [H] qui a été privé d’un accès à des données personnelles dont il aurait pu faire usage un préjudice »
L’employeur est condamné en appel au versement de dommages et intérêts à différents titres.
Un pourvoi est formé par l’employeur condamné, le refus de communication des mails n’étant que l’un des moyens de cassation invoqués.
Sur ce point, la cour de cassation confirme le raisonnement de la cour d’appel dans une motivation claire et didactique :
1. Les courriels émis ou reçus par le salarié grâce à sa messagerie électronique professionnelle sont des données personnelles au sens de l’article 4 du RGPD
2. Le salarié a le droit d’accéder à ces courriels
3. L’employeur devant lui fournir tant les métadonnées que leur contenu
4. SAUF si les éléments dont la communication est demandée sont de nature à porter atteinte aux droits et liberté d’autrui.
L’erreur de l’employeur a été d’opposer au salarié une fin de non recevoir, sans expliquer en quoi la communication de ces mails à l’ancien salarié aurait porté atteinte aux droits et liberté d’autrui. C’est cette absence d’explication qui est considérée comme fautive.
Or, il nous semble acquis que communiquer à un ancien salarié ses anciens mails cause un préjudice aux autres personnes qui ont été émettrice, destinataires ou co-destinataires de ces mails, ainsi qu’à l’employeur.
Un salarié reçoit et émet des mails dans un cadre professionnel. C’est dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions professionnelles respectives que les personnes parties à l’échange (émetteur et destinataires) acceptent l’émission et la réception de ces correspondances. Elles n’ont pas pu accepter une utilisation de ces propos en dehors du cadre initial dans lequel ils ont été tenus.
Il y a également un contenu informationnel dans ces mails qui est la « propriété » de l’entreprise, l’employeur est légitime à vouloir le protéger et à ne pas le fournir.
Soulignons également les difficultés purement matérielles : comment effectivement communiquer à un ancien salarié ce qui peut représenter des centaines de méga-octets de données ?